mercredi 28 juillet 2010

Un tricot vert, deux bas si rouges

Un tricot vert, deux bas si rouges... Rouge sur rouge, rien ne bouge. Vert sur vert tout est clair...

Mais oui, t’inquiète pas mon Gwen, ça va rentrer... Un tricot vert, deux bas si rouges... Rouge sur rouge, rien ne bouge. Vert sur vert tout est clair...


C’est que cela fait un bout de temps que je n’ai pas préparé un examen moi... Un tricot vert, deux bas si rouges... Rouge sur rouge, rien ne bouge. Vert sur vert tout est clair...

Alors... Si je vois cette espèce de culbuto rouge en sortant du port, il faut que je passe... Deux bas si rouges. Bouée bâbord en entrant donc tribord en sortant, je passe donc à gauche et je la laisse à droite... A tribord... Yes ! C’est ça !
Un tricot vert, deux bas si rouges... Rouge sur rouge, rien ne bouge. Vert sur vert tout est clair...

Et oui mes amis, comme vous pouvez le constater, depuis le début de la semaine j’ai attaqué le bachotage du permis côtier. Oui, je dis bien bachotage, car il n’y a pas à tortiller c’est du par cœur et rien d’autre.
Oh, il y a bien quelques moyens mnémotechniques (Le tricot vert et les bas rouges) pour arriver à se souvenir de tout, de même il y a parfois une certaine logique dans la chose, mais dans l’ensemble il s’agit d’enregistrer un ensemble de règles édictées de façon péremptoire.

C’est comme ça, et c’est pas autrement. Pas de discussion, exécution.

Bon, vous allez me dire qu’avec ma petite expérience cela ne devrait pas trop poser de problèmes... Mouais, peut-être.
Il n’empêche qu’à force de la potasser ce foutu bouquin, je me rends compte qu’il y a des tas de trucs que je sais sans le savoir vraiment, et d’autres que j’ignore totalement.
Donc, je bosse.

Je bosse, je bosse, je bosse. Même dans mon sommeil je bosse. Dans mes rêves de cette nuit je voyais des bouées partout. Des vertes, des rouges, des jaunes à petits pois... qui volaient... Bref, je suis à fond dedans.

C’est la phase deux du projet à Gwen. Le passage des permis côtier et hauturier. Et j’entends bien à ce que celle-ci se passe aussi bien que la première.

Motivé le Gwen. Mo-ti-vé !

Bon, cela-dit il faudrait peut-être que je pense un peu à dormir moi... Et si possible sans être réveillé à quatre heure trente du mat’ par des bouées qui volent !

C’est qu’il faut quand même que je pense à ma petite santé, hein ?

vendredi 23 juillet 2010

Bilan

Bien, maintenant que je vous ai raconté cette petite virée en bateau le long des côtes Françaises et Espagnoles, il serait sans doute intéressant que j’en tire une espèce de bilan... Enfin, intéressant pour moi c’est sûr, pour vous je ne sais pas. C’est vous qui verrez.
Mais je tiens quand même à rappeler aux lecteurs que je ne suis pas parti pendant quinze jours uniquement pour me dorer la pilule. Il s’agissait d’une étape importante dans l’exécution d’un plan ambitieux...

Donc, bilantisons ensemble si vous le voulez bien.

En ce qui concerne la tenue de mon pied (ce qui était quand même le but premier de cette virée), je crois que vous serez tous d’accord avec moi, cela relève du miracle.
Enfin, miracle est peut-être un mot un peu fort mais le fait est qu’il s’est comporté de façon extrêmement satisfaisante, voire même au-delà de toutes espérances.
Au fond de moi je me doutais bien que les choses se passeraient plutôt bien, mais pas à ce point là.
Depuis que je suis rentré, certains me parlent de troubles psychosomatiques, me disent que le bonheur fait bien des choses... Franchement je ne sais pas. Et j’ai même envie de dire que je n’ai pas envie de savoir. Pour moi, seul le résultat compte, et ce résultat me dit que je suis mieux sur l’eau que sur terre. Point barre.

Cette parenthèse voilière avait également un autre objectif... Dont je n’ai pas trop parlé jusqu’ici pour des raisons que vous comprendrez je pense. Il s’agissait pour moi d’évaluer mes compétences en tant que marin. En clair, répondre à la question suivante : Gwen, es-tu suffisamment compétent pour avoir et conduire ton propre voilier ?

Là, pour être tout à fait honnête avec moi-même, et avec vous, la réponse que je me fais est moins enthousiaste que pour ma cheville...
Pour ménager ma fierté je dirais que je suis conscient qu’il me reste énormément à apprendre.
Autant je pense pouvoir affirmer sans rougir être un très bon coéquipier, un navigateur correct, et un barreur à peu près compétent. Autant j’ai conscience que je suis à l’heure actuelle incapable d’effectuer tous ces trucs tout seul. Et en même temps qui plus est !

Voilà, c’est dit. Il va donc me falloir travailler à ça avant que de vouloir prendre le large, et j’envisage donc de repartir d’ici la fin de l’été afin de me former plus avant. De même, Au lieu de partir courant octobre... Et bien on va attendre un peu le printemps suivant.

L’achat du bateau est toujours programmé pour l’automne et mon emménagement dessus aussi, mais je pense passer l’hiver à, comment dire... A le prendre en main. Voilà, on va dire ça comme ça.
Il va falloir qu’on fasse connaissance tous les deux et que j’apprenne à lui faire confiance, et inversement. Donc d’octobre à mars, dès que le temps le permet la Boiteuse et moi on ira se balader main dans la main. D’abord on va faire des petits tours avec un ou deux équipiers histoire de voir comment ça se passe. Et puis peu à peu, on fera en sorte de rester en tête à tête... On ira de plus en plus loin, de plus en plus longtemps. Et une fois que ça colle, qu’on est sûr de nos sentiments, on publie les bans et on se casse.

Bon sinon, d’un point de vue humain, cette rencontre et cette cohabitation avec sept personnes que je ne connaissais pas, m’ont très agréablement surpris car elles ont révélées une facette de ma personnalité que je croyais effacée depuis une bonne vingtaine d’année... A savoir que je suis un type plutôt sympa.
Oui, c’est ça, marrez-vous, mais je vous prie de croire que pour moi, pendant un bout de temps cela n’a pas été une évidence. Loin de là.
Cela répond donc à une petite crainte que j’avais en mon fort intérieur... A savoir que je risquais de prendre goût à la solitude comme un accroc à sa came par peur d’aller vers les autres. Et bien non, j’ai retrouvé ce côté liant qui était le mien lorsque j’avais vingt ans, et ça, je peux vous dire que ça me rassure au moins autant que l’état de ma cheville.

Que peut-on dire d’autre ? Que je me suis bien marré, ça vous l’avez compris. Que j’ai énormément progressé également. Je veux dire par là que sur cette croisière, j’ai enfin compris des choses que je m’évertuais à saisir depuis dix ans sans y arriver vraiment. Donc qu’il me soit permis ici d’en remercier Régis et son sens de la pédagogie. Merci beaucoup.

Sinon, en vrac et dans le désordre ces quinze jours auront été le cadre de :

418 milles marins parcourus soit 774, 136 Km.
9 escales.
Un seul kilo de perdu, mais une taille et demi de pantalon de perdue aussi.
957 photos, 5 vidéos.
Un petit doigt égratigné, une dent cassée avec un sandwich au pâté (oui je sais, faut le faire)
Un poulet au curry façon Gwen délicieux. (voir dernière photo)
Des crumbles à la pomme façon Charline non-moins délicieux.
Zéro coup de soleil, mais un bronzage façon Glénans (avec la trace des sangles du gilet de sauvetage dans le dos).
58 chansons chantées.
Des tapas en veux-tu en voilà.
Un moral au beau fixe et une conviction renforcée.

Et puis quand je vous disais que je m’étais bien marré, en voici la preuve !




jeudi 22 juillet 2010

De Sant Feliu à Sète

Le 12 juillet 2010
42°22'24.16"N 3° 9'43.85"E
Sant Feliu de Guixols-Llansa

Le lendemain, alors que l’Espagne se réveille avec une étoile accrochée sur le devant de son pyjama, l’équipage du Bonne Espérance reprend sa route vers le Nord-Nord-Est.

Ce fut une belle journée, à la fois riche en rebondissements, en pratiques de voile, en rigolade aussi...
Tout d’abord, Eole nous a fait la grâce d’être avec nous pour une fois. Il nous a soufflé modérément dans le dos pendant la matinée pour ensuite nous offrir un petit zeph dans le près-bon-plein, ce qui fait que nous avons pu avancer de plus de 55 milles dans la journée.

Vent modéré au portant (dans le dos), pour les voileux cela veut dire une chose : On peut sortir le spi.
Bon, je vais être franc avec vous, ce n’est pas ma voile préférée... C’est joli tout plein on est d’accord, mais casse gueule si le vent n’est pas bien établi, ou si vous avez un instant d’inattention. C’est technique comme voile. En plus, c’est un peu comme si vous rajoutiez un drap de lit à votre voilure alors que jusqu’ici vous ne naviguiez qu’avec les taies d’oreiller... Vous faites une connerie, et en un rien de temps vous allez au tas.

Et c’est ce qui nous est arrivé.

Moi, je faisais la navigation (c’est pas moi m’sieur !), c'est-à-dire que j’occupais une de mes places favorites, à savoir debout dans les escaliers de la descente, avec juste la tête qui dépasse pour pouvoir regarder où on est.
Nous avancions à bonne allure (8-8.5 nœuds avec ce camping-car flottant c’est pas mal) lorsque soudain une force irrésistible fait pencher le bateau sur tribord.
Je me retrouve alors debout, droit comme un i, les deux pieds sur la gazinière. Je m’accroche comme je peux, mon regard tombe sur le hublot au dessus de la cuisine, et je ne vois que de gros bouillonnements de flotte... Là c’est clair, on vient de faire un départ au lof.

« Aller au tas » ou « partir au lof » sont des expressions qui veulent dire la même chose. Le bateau remonte le lit du vent, et le spi sensé se trouver à l’avant du bateau se retrouve sur le côté... Résultat, vous effectuez une espèce de dérapage incontrôlé, et si vous ne réagissez pas vite, le drap de lit a vite fait de vous retourner le bateau comme une galette bretonne.

J’entends Régis qui gueule : « Choque le bras ! ». Julien réagit au quart de tour (brave petit !) et j’entends l’écoute filer à toute vitesse dans les poulies. Le bateau se redresse un peu et Régis de gueuler de nouveau : « Choque la GV ! ». Une main anonyme s’en charge (ben oui, je n’ai pas vu qui s’était, vu que j’avais maintenant un pied sur la gazinière, l’autre sur la dernière marche de l’escalier et la tête collée au plafond !) et nous retrouvons enfin une position horizontale...
Cela n’aura duré que quelques secondes, mais la violence de la séquence est telle que je la vois encore au ralenti dans ma tête...
A bord, personne n’est blessé mais on est tous un peu sous le choc. Le silence s’établit alors que les visages reprennent peu à peu des couleurs. En haut du mat le spi libéré de ses écoutes flotte comme un drapeau. Un gros drapeau de 90m²...

Quand je vous disais que c’était casse gueule un spi.

On est là, tranquille. On profite. Et Eole qui semblait nous faire une fleur se met à nous postillonner dans le trou de balle. Dans ces cas-là on reste humble, on remballe ses petites affaires et on dit merci.

Et c’est ce que nous avons fait. On a remballé le bouzin, et repris notre cap avec le Génois et le GV.

Vers 13h00 la bascule a lieu au large du Cap de Creus, on se trouve donc avec un près-bon plein sympa. Moi, je vais piquer un petit roupillon des familles et lorsque j’émerge c’est pour m’apercevoir que nous sommes sur le point de mouiller dans une petit cala bien sympathique quoique déjà occupée par une dizaine d’embarcation.
Après l’effort, le réconfort.

Petit moment choisi sans malice aucune...



Une petite heure plus tard nous levions l’ancre, direction Llansa.

Le 13 juillet 2010
43° 6'31.03"N 3° 5'38.35"E
Llansa-Gruissan

Cette fois-ci la Capitainerie nous a un peu mieux placés. C'est-à-dire que nous nous trouvons un peu plus près des commodités et du village.
La veille au soir je m’en étais fait la promesse, et c’est donc avant les poules (genre 05h15) que je grimpe sur l’espèce d’oppidum rocheux qui jouxte le port. Un panneau me précise que cet endroit est occupé depuis le néolithique. Normal, depuis le sommet la vue est imprenable et la position idéale pour balancer, le cas échéant, des cailloux sur la tête de l’imprudent envahisseur.
06h10 : Top départ ! Le soleil apparait à l’horizon de l’océan méditerranéen. Clic, clic, clic, j’enchaine les photos. C’est magnifique. Je ne regrette pas les efforts qu’il m’a fallu déployer pour grimper sur ce foutu promontoire...

Avant que de retourner au bateau je fais un détour par la ville endormie. Là encore je goutte le silence et le charme de cette petite citée. Je croise les services de voirie, quelques abuelas traitent leurs jambes lourdes en marchand dans l’eau. Un couple de chats m’observe du coin de l’œil... Quelques commerçants commencent à ouvrir leurs échoppes et me saluent avec gentillesse. Vraiment agréable comme ballade.
07h30 je mets fin à cette parenthèse solitaire et rejoins mes camarades qui commencent à se lever.

Le reste de la journée ne m’a pas particulièrement marqué, si ce n’est que nous avons eu du vent de bout en bout. Après l’incident de la veille nous ne cherchons pas à faire les malins et nous prenons ce qu’Eole nous offre.

Ah si ! Le soir, un bateau est venu s’amarré tant bien que mal juste à côté de nous... A son bord, le propriétaire qui navigue depuis un bout de temps, sa femme et un ami. En les voyant faire et en les entendant nous prendre de haut parce que nous étions un bateau-école, je me suis dit que tout élèves des Glénans que nous étions, nous avions, chacun d’entre nous, bien plus d’expérience que ce type... Et ça... ça m’a plu.

Le 14 juillet 2010
43° 6'31.03"N 3° 5'38.35"E
Gruissan-Gruissan

La météo nous annonce un coup de vent... Du 5-6 sur l’échelle Beaufort de secteur sud, avec une forte houle située dans la mer du vent. 5-6, c’est jouable pour nous. Nous partons donc en direction d’Agde.
Vers 13h00, le bruit du moteur qu’on allume me sort de mon petit roupillon journalier. Qu’est-ce qui se passe ? On fait demi-tour ? Ben pourquoi ?
En fait, la houle ayant forcie et se situant directement dans l’axe d’entrée du port d’Agde, celle-ci compromet notre entrée.
J’explique : La houle c’est une onde. Ok ? L’amplitude de cette onde (du point le plus haut au point le plus bas) était de 3 m. Sachant que la profondeur à l’entrée du port est de 2,50 m et que le tirant d’eau du bateau est de 1,90 m... Une fois sur deux, selon que l’on se trouve au sommet ou bien au creux de la houle, et bien... On touche.
Vous avez compris ? Bien.

Donc on fait demi-tour et on rentre à Gruissan. De toute façon c’est pas grave, on a un jour d’avance.
Après-midi à buller comme de vrais touristes et le soir, fête nationale oblige, nous avons eu droit à un superbe feu d’artifice. C’est qu’ils ont l’air d’avoir du pognon à dépenser à Gruissan dis-donc !

Le 15 juillet 2010
43°23'47.97"N 3°42'3.72"E
Gruissan-Sète

Bon, là on n’a pas le choix il faut rentrer. Le stage se fini demain, et il nous reste encore quelques enseignement à valider, donc on trace et on rentre directement au port d’attache : Sète.
Les 37 milles (60 Km) sont vite avalés et c’est vers 17h00 que nous arrivons à ce qui était notre point de départ quelques 12 jours plus tôt.
Aussitôt quelques-uns d’entre nous se dirigent vers la gare pour régler quelques problèmes de billets de trains. Moi-même pendant un moment je me tâte pour savoir si je vais rentrer... C’est que depuis quelques jours j’ai une furieuse envie d’enquiller sur un deuxième stage. Je suis tellement bien sûr l’eau que j’ai envie d’y rester. Mais bon, avec le recul je me dis que j’ai bien fait de rentrer car sur le moment je ne me rendais pas compte à quel point j’étais fatigué...

Le soir a lieu le traditionnel repas au resto de fin de stage. En effet, depuis que je navigue avec les Glénans, à chaque fois qu’un stage se fini nous nous retrouvons tous au restaurant et nous invitons notre moniteur. Cette fois-ci encore la tradition sera respectée.

Direction les quais, où nous dénichons une gargote du nom de « l’Amphore »... Et là mes amis... Là...
Putain, je me suis régalé. En entrée la fameuse tielle sétoise, suivie par des brochettes de gambas et coquilles Saint-Jacques et pour finir une crêpe au chocolat de la mort qui tue !
Délicieux ! Succulent ! Et en plus le patron a été vachement sympa.
Bref, une bonne soirée.

Le 16 juillet 2010
43°23'47.97"N 3°42'3.72"E
Sète

Et bien voilà... On y est. C’est le dernier jour.
Il faut bien que les choses aient une fin comme dit l’autre, puisqu’elles ont un début... Mais bon, l’heure n’est pas encore aux yeux mouillés et aux échanges d’adresses puisqu’il nous reste encore pas mal de choses à faire et pas des moindres.

C’est l’ennui avec les stages à destination. L’objectif principal étant de rallier ladite destination, du coup on a tendance à en oublier que les Glénans sont d’abord et avant tout une école. Avec des leçons, des devoirs et des interros.
Depuis le début de cette histoire je vous ai fait grâce des topos impromptus de Régis sur les manœuvres, la sécurité, etc... Les cours sur l’aérodynamique, l’hydrodynamique, la météorologie (ah non, ça on l’a zappé)...
Bref, on bronze ok, mais on est là aussi pour apprendre. Et on pourrait dire que le syncrétisme (putain, j’utilise de ces mots moi ce matin !) de cet enseignement s’exprime dans un seul et même exercice : La récupération d’un Homme à la Mer (HLM), sous voile of course.

Ce genre de truc, c’est mon cauchemar. Cela demande à posséder un sens aigu de sa propre position par rapport au vent et un objet à la dérive... Bref, en dix ans il m’est arrivé de réussir cet exercice mais j’ai l’impression que c’était à chaque fois avec le plus éhonté des bols.

Ah oui, petite parenthèse. Si vous vous demandez pourquoi sur les photos nous portons tous nos gilets de sauvetage en permanence, c’est justement à cause de l’HLM. Si vous n’êtes pas capable de récupérer un coéquipier tombé à l’eau en moins de trois minutes, sous voile et dans les règles de l’art, vous gardez vos gilets. C’est comme ça aux Glénans et il n’y a pas à discuter.

Donc nous partons vers 09h00 pour nous trouver un coin de mer où mener nos exercices... Régis balance une perche par-dessus bord et demande donc, dans un premier temps, à chacun de s’approcher de cette perche sous différentes allures. Au près, bâbord amure sous son vent. Au travers, tribord amure au vent... etc. Bref, les combinaisons s’enchainent et nous y passons tous, chacun à notre tour et ma pomme en dernier.
Tous s’en sortent plutôt bien, et particulièrement Julien qui nous fait ça « fingers in the nose » (Grrr !!!).
Arrive mon tour, et je m’en sors, comment dire, moyennement... J’ai en effet un peu de mal à maintenir ce foutu Grand-largue et je dois m’y reprendre à trois fois avant que le Régis ne valide ma prestation.
Je poussais un soupir de soulagement lorsque j’entends mon Régis qui me dit : « Bon maintenant tu vas me récupérer cette perche comme si c’était un HLM » c'est-à-dire le nez sur le machin, sous son vent et à la vitesse de zéro nœud. « Tu fais comme tu veux mais tu le fais vite. »
Gloups !

Pendant une seconde mon cerveau semble ne plus vouloir fonctionner... Puis j’envisage sérieusement de faire ce que tous voileux feraient en temps normal : A savoir rengainer la toile et y aller au moteur...
Et puis je ne sais pas ce qui m’a pris... J’ai fait ça à l’ancienne. Hop, un virement de bord. J’abats dans la foulée, je relofe. J’ordonne qu’on enroule le génois (magnez-vous bordel !). Un coup de barre par ci, un autre par là... Trois nœuds, 2, 1, 0.8, 0.6, 0.3, 0.1, zéro nœud... Et voilà la perche à un mètre du bateau, entre le vent et nous, le bateau arrêté.

La manœuvre parfaite. Oui m’sieurs-dames ! Et tout ça en deux minutes !

Je n’en revenais pas d’avoir réussi du premier coup, sans même réfléchir à ce que je faisais ! Vous n’avez pas idée combien j’étais content de moi ! Pour un peu j’aurais sauté dans tous les sens en gueulant, mais j’ai préféré m’abstenir par égard aux copains qui prenaient déjà la suite.
Je suis descendu dans le carré, et là j’ai serré les poings en murmurant entre mes dents : « Yeeees ! ».
C’était pour moi une façon merveilleuse de clore cette virée.

Une fois que tout le monde eut sacrifié à cet ultime exercice, nous sommes rentrés au port. Nous avons déjeuné brièvement avant que d’entreprendre la tâche la plus chiante de toutes. Le nettoyage en grand du bateau.

Vers 17h00 Jean et Paul nous ont quittés. Puis Juju. Xavier et Charline sont partis de leur côté... Et je suis resté seul avec Véronique car nos trains respectifs ne partaient que le lendemain.
Nous sommes retournés dîner à l’Amphore (ben oui, quand c’est bon on y retourne !). Pas de bol il n’y avait plus de crêpe au chocolat. C’est pas grave, la tarte Tatin a très bien fait l’affaire...

Le lendemain je prenais le train de 12h45 pour Nice.

A suivre : Un petit bilan des familles...

mardi 20 juillet 2010

Une soirée de finale

Le 11 juillet 2010
41°46'40.42"N 3° 2'5.95"E
Barcelone-Sant Feliu de Guixols

Huit heures de moteur... C’est long. C’est chiant. Ça fait du bruit et ça sent mauvais. Mais en même temps quand vous avez le vent dans le nez et pas de temps devant vous pour attendre la bascule, vous n’avez pas vraiment le choix.
En plus de celui de remonter vers Sète, l’objectif de cette journée est de se trouver un endroit pour regarder la finale de la coupe du monde de football opposant l’Espagne au Pays-Bas...
Oui je sais. Ça va être le premier, et le seul, match que j’aurais vu cette année. Mais en même temps il faut bien supporter l’équipe du pays qui nous reçoit, c’est de la plus élémentaire des politesses.

Sinon, ces heures interminables au moteur aillant pour conséquences de favoriser la réflexion, j’ai un peu avancé dans mon petit bilan perso.
Le pied, c’est gagné. On dirait qu’il ne s’éclate que sur l’eau ce con ! Trituré, sollicité en permanence par la compensation d’équilibre, il n’y a que comme ça qu’il semble s’épanouir. Sur terre, le moindre effort relève du calvaire, alors que sur l’eau... C’est à n’y rien comprendre.
Vous me verriez au bout d’une semaine sauter du bateau sur les pontons flottants l’haussière à la main ! Un vrai singe !
Bon d’accord, un gros singe je vous l’accorde, mais un singe quand même.

Sant Feliu, c’est probablement le plus joli port dans lequel nous nous soyons arrêtés... C’est d’abord et avant tout un port de pêche et on sent bien qu’il y a des gens qui bossent ici. De plus il remporte haut la main le ruban rose des plus beaux sanitaires ! Et cette capitainerie incrustée dans les rochers... La classe.

Le soir on s’est un peu empêtré dans les horaires et ce n’est que vers 21h15 que nous prenons le chemin de la ville pour trouver un troquet où regarder le match.
Dans mon esprit j’avais imaginé une soirée dans un bar sur-bondé avec des drapeaux, des clients enthousiastes, des conversations multilinguales... Vous voyez le genre ?

Et bien ce fut un peu différent.

Comme nous avions trainé un peu et rater la première mi-temps, nous nous sommes pointé, à huit, dans le premier rade que nous avons trouvé. A savoir une terrasse de bar près du port de pêche qui jouxte le port de plaisance.
Sous l’auvent de la terrasse, une douzaine de clients, tous des hommes et visiblement immigrés, sont là, sirotant une bière ou un jus de fruit, et picorent des olives.
J’entre le premier et demande si on peu boire un coup et regarder le match... Si, no problemo. Vamolos.
On s’installe au fond du truc, mais on sent bien que notre présence n’est pas... Comment dire... Ce n’est pas qu’on dérangeait, non, mais on faisait un peu tâche quand même.

Certains d’entre nous émettent même le désir de mettre les voiles... Mais trop tard, la patronne est déjà là pour prendre les commandes. Bon ok, on prend un verre par politesse et puis on se casse discretos.

C’est là qu’on avise l’écran de la télé et qu’on constate que le patron a comme un souci avec son antenne...
Imaginez un peu : Une télé visiblement apportée pour l’exceptionnelle occasion, et son propriétaire planté à côté, les bras en l’air, tentant désespérant de maintenir un signal pour le moins capricieux.
Et que je t’oriente le machin dans tous les sens. Avec la main gauche. La main droite. Les deux en même temps... Lorsqu’enfin il arrive à obtenir quelque chose de correct et qu’il essaye de soulager ses bras engourdis par l’effort, paf l’image se barre !

A un moment il arrive enfin à trouver un bon angle et essaye tant bien que mal de monter une espèce de piédestal pour maintenir l’antenne. Un seau à glaçon, un distributeur de serviette en papier... Ça branle de partout. Ça tombe. Son fils débarque et l’engueule comme du poisson pourri : « Mais pourquoi tu as touché l’antenne ? Elle marchait bien avant ! » (En catalan dans le texte).
Le père de sourire, penaud... Et l’image de tressauter comme si elle était douée d’une vie indépendante.

Et pendant ce temps-là le match se transformait en une partie de kick boxing, et s’éternisait avec un 0-0 qui laissait augurer des prolongations... Ce qui n’était pas forcément une bonne nouvelle à la fois pour l’Espagne et pour le vieux monsieur qui tenait l’antenne.

Nous, au fond de la terrasse, on était plié de rire. Discret le pliage, mais pliage quand même.

Prolongation donc, but d’Iniesta. Hurlements dans le bar et dans la rue. Plus que quelques secondes avant le coup de sifflet final et la victoire de l’Espagne !

Cinq secondes... Quatre... Trois... Deux... UN...

C’est alors que retentissent les sirènes des bateaux dans le port. Toutes ensembles. Un son profond qui vous fait dresser les poils sur les bras.

Impressionnant.

Aussitôt voilà tous les clients, à part nous, qui se lèvent comme un seul homme et se précipitent sur le quai pour, croyions nous, laisser éclater leur joie en courant partout comme des débiles.

Que nenni.

Nous n’avions pas vraiment fait gaffe (en tous cas moi), mais à quelques mètre, amarrés les uns aux autres, une douzaine de bateau de pêche au lamparo, des unités de 20 m quand même, poireautaient. Et je ne sais pas si vous le savez mais la pêche au lamparo ça se pratique la nuit. On part le soir à la tombée du jour et on revient le lendemain... Les bateaux étaient donc restés à quai pour le match, amputant ainsi cette nuit de pêche. Mais sitôt le coup de sifflet final les capitaines se sont empressés de rappeler à bord tous les équipages !
Je ne vous raconte pas le bordel.

Les marins se précipitent. On charge au plus vite les dernières palettes de sacs de glace que l’on enfourne dans les cales. Ça crie, ça court dans tous les sens. De puissants projecteurs illuminent toute la scène.
Les moteurs rugissent dans la nuit, faisant retentir leurs milliers de chevaux. Les premiers bateaux s’écartent de leurs camarades et mettent la gomme alors même qu’ils sont encore dans le port. 












L’eau bouillonne. Les barques d’accompagnement font du surf dans le sillage laissé par ces monstres. Un à un, ils partent pleine balle en direction du large.

Nous sommes restés là, sur le quai, à regarder ce ballet fabuleux de machines rugissantes. Elles se tirent la bourre dans le chenal, se doublent, se frôlent sans se toucher... On dirait qu’elles dansent. De nouveau on entend les sirènes lorsque les bateaux passent les bouées du port.
Putain que c’est beau... J’en ai des frissons partout. Je mitraille à tout va, prenant des clichés pas toujours réussis. Je me remplis les yeux de ce spectacle magnifique.

 En dix minutes, montre en main, le port était vide.

La nuit sera courte pour ces pêcheurs, et certainement peu fructueuse... Mais qu’importe, ils sont Champion du Monde après tout.

Le lendemain matin, alors que j’assistais à mon levé de soleil désormais quotidien, j’ai aperçu le premier de ces bateaux qui rentrait au port...


A suivre...

lundi 19 juillet 2010

Barcelona

Le 8 juillet 2010
41°22'48.64"N 2°11'6.14"E
Palamos-Barcelone

Dernière étape avant Barcelone. Pour être sûr d’y être avant la fin de la journée, et compte tenu des conditions météo, nous avons du marcher au moteur pendant une bonne partie de la journée.
Du coup on s’emmerde un peu... Alors pour passer le temps et affiner notre « sens marin » on lit le paysage... C’est un exercice que j’aime assez. Il consiste à longer une côte et essayer de reconnaitre ce que l’on a sous les yeux avec une carte. Rien de bien compliqué en fait, mais c’est relativement nécessaire lorsque vous faites du cabotage et qu’il s’agit de savoir exactement où l’on est.
Vers 18h00 nous passons les bouées du port de Barcelone... et là, vlan ! J’ai pris une grande claque dans la gueule. La ville vue du port est telle qu’elle était dans mon souvenir : Magique !

A peine amarré à l’emplacement qui nous est désigné, les petons nous démangent. Il nous tarde de nous échapper pour découvrir tout ce qu’a à offrir la capitale de la Catalogne, ville de monument et de culture par excellence. Aussi, direction la plage...
Ben oui, y’avait la petite qui voulait absolument se baigner à la plage, mais elle ne savait pas trop où elle se trouvait exactement... Moi, vous me connaissez, les jeunes filles en détresse je ne supporte pas. Xavier aussi d’ailleurs. On est donc parti tous les trois en direction de la Barcelonnette au pied de l’immeuble de Largo Winch...

Et là, comment vous dire... De ma vie je n’ai jamais vu une plage aussi pourrie. Des détritus partout. Des canettes, des gobelets, des sacs plastiques, des restes de nourritures... Et au milieu la populace la plus sans-gêne que j’ai pu voir jusqu’alors. Une bande de malpolis, le cul posé sur un dépotoir.
Et croyez-moi si je vous dis que ça parlait énormément français autour de nous.

Du coup, devant un tel spectacle, je ne sais pas trop pourquoi mais la Charline, elle n’avait plus trop envie de se baigner... On est donc resté là, assis sur un mètre carré à peu-près propre, pendant que le Xavier semblait vouloir rejoindre la Sardaigne à la nage, à observer le spectacle fascinant de nos contemporains.

Un type s’éclatait à deux pas de notre îlot précaire, une bouée autour de la taille, une pile de caillou sur la tête et des pailles dans les oreilles... Une bande d’indiens semblait vouloir s’en prendre à une autre bande de nord-africains. Un type complètement nu me passa à un mètre, me mettant son service trois pièces directement sous le nez...

¡ Bienvenida en Barcelona !

Un peu sonné par cette première approche peu conventionnelle, nous nous somme arrêté pour boire un rafraichissement avant que de réintégrer le bateau.
Diner à bord puis concert de nouvelle chanson catalane sur le toit du musée d’en face. La ville remue dans tous les sens. Elle chante, respire avec force. Les gens déambulent dans la tiédeur du soir. Les femmes sont magnifiques. Bref, on est bien.
Pour les autres je ne sais pas trop, mais en ce qui me concerne 01h15 du mat : Dodo !

Le 9 juillet 2010
41°22'48.64"N 2°11'6.14"E
Barcelone
Bon, là il va me falloir faire fonctionner ma mémoire. Les deux jours que nous avons passés à Barcelone ont été tellement pleins que je n’ai même pas pris le temps de prendre de note. Donc, que les protagonistes ne me tiennent pas rigueur si j’oublie un truc ou deux.

Lorsque qu’on est l’équipage que je vous ai décrit, vous imaginez bien que les attentes des uns et des autres sont forcément différentes. De plus, après avoir passé une semaine les uns sur les autres, le désir de s’échapper est légitime. Pour ma part je décide de m’associer au jeune Julien pour cette première journée de visite. Le matin on va où il veut et l’après-midi c’est mon tour. Le deal étant conclu, direction le stade du Camp Nou (41°22'51.23"N 2° 7'22.24"E), fief de l’équipe du Barça.
Oui je sais, c’est surréaliste le Gwen qui traverse toute une ville pour aller visiter un stade de foot... Et bien ce le sera plus encore quand vous apprendrez que je n’ai pas regretté une seule seconde !

Mais avant ça, direction la Boqueria, ce fabuleux marché couvert où je sais trouver des jus de fruits frais de la mort qui tue. Pendant un moment nous en prenons plein les yeux, le nez, les papilles. Cet endroit est véritablement magique.
Puis on se l’est joué, Juju et moi, façon milord en prenant un taxi pour traverser la ville. Pourquoi pas les transports en commun me direz-vous, et bien d’abord parce que les taxis ne sont pas très chers, et puis aussi pour ménager mon peton.

Arrivé là-bas, je commence à halluciner. Une foule nombreuse, des gamins partout, des queues interminables... J’étais tombé dans un temple dédié au Dieu football où les croyants venaient faire leurs dévotions.
Le but pour Julien étant d’acheter un maillot du joueur Messi pour offrir à sa sœur... nous avons donc pris la direction de la boutique (les marchands du temple). Et là mon hallucination s’est transformée en délire. En fait de boutique, c’était carrément un super marché !
Et un monde ! Vous n’imaginez même pas !

Des colonies de vacance avec leurs teeshirts jaune, des familles de touristes partout ! Les rayons pris d’assaut, des produits dérivés en veux-tu en voilà ! Et pas pour acheter des produits à trois francs six sous, 94 € le maillot de Messi !

J’étais là, les yeux écarquillés, à me répéter sans cesse à voix basse : « J’hallucine, j’hallucine, j’hallucine... ».
A un moment, et alors que je me disais ça pour la énième fois, je n’ai pu m’empêcher de ressentir comme une espèce de respect pour tous ces gens... Non pas pour la futilité de leurs actes, mais pour cette passion, cet amour inconsidéré pour ce sport. Pour cette équipe.
Quel que soit l’objet de cet amour, c’est quand même de l’amour. Et je vous jure que dans cet endroit, cet amour était palpable

Lorsque nous sommes partis, j’étais un peu chamboulé par tout ce que j’avais vu. Et en plus j’avais faim. Donc nous avons repris un taxi pour aller déjeuner dans un endroit sympa, à savoir un petit resto au sommet du mont Juic avec vue imprenable sur la ville.

Sandwich pour Juju, tapas pour bibi. Il était temps parce qu’à 15h00 je commençais à dépérir moi !
Petit digestion dans le téléphérique et retour au bateau pour une petite sieste bien méritée, histoire de reprendre des forces avant la sortie de la soirée. A savoir un diner collectif dans un bar à... Tapas.
Tapas, tapas, tapas... Si je pouvais définir en un seul mot ce que m’évoque Barcelone, ce serait celui-ci.

Le lendemain, dès dix heures du mat’ on s’en est remis plein la panse avec Xavier de croquette de bacalau (morue). A quatre heures aussi... Bref, rien que pour leur contribution à la cuisine mondiale, les espagnols méritent d’être canonisés dans leur ensemble. Voilà, c’est dit.

Qu’est-ce qu’on a fait aussi le lendemain ? Ah oui, la matinée fut consacrée à un petit inventaire de nos ressources alimentaires pour réapprovisionnement. Puis nous avons déjeuné sur le bateau, avant que de partir visiter l’aquarium.
Bon ben c’est un aquarium quoi... avec des requins des murènes tout ça... Et puis un poulpe sympa que j’ai appelé Albert.
Parce qu’il faut que je vous dise que la veille au soir, alors que nous dînions de tapas (of course), dans la confusion du service et la multitude des plats, quelques petits malins m’ont privé de mon Pulpo a la Gallega que j’avais commandé exprès pour moi. 

Ils ont pris ça pour du poulet qu’ils m’ont dit pour se justifier, ces gougnafiers ! (et gougnafières).
Donc j’ai été privé de mon poulpe et lorsque j’ai rencontré Albert j’ai trouvé qu’il avait de beaux tentacules...

Bref, dans la foulée nous avons accompagné la petite faire du shopping à la galerie marchande. Une heure de marche pour ne rien acheter. Sans commentaire.

Retour au bateau, diner, papotage et dodo, parce que le lendemain nous reprenons la mer pour rentrer !

Deux jours, ce n’est vraiment pas assez pour tout voir à Barcelone... Mais ce n’est pas grave, j’y retournerais ! Et cette fois-ci se sera avec la Boiteuse !

dimanche 18 juillet 2010

De Sète à Barcelone...

J’ai un petit souci ce matin... D’abord c’est la première fois en une quinzaine de jour que je ne sort pas dans le cockpit pour boire mon café et fumer ma clope, et l’absence de levé de soleil me manque un peu. Puis, mais là vous allez me dire que ce n’est pas votre problème, je ne sais pas trop comment aborder le récit de ces quinze jours de mer...
Le mieux est peut-être de reprendre mes notes, de les retranscrire en brodant un peu et de ponctuer le tout avec quelques photos choisies... Hein ? Qu’est-ce que vous en dites ? On fait comme ça ?
Ok, alors c’est parti.

Le samedi 3 juillet 2010.
43°23'47.97"N 3°42'3.72"E
Le Môle St Louis à Sète

Et bien ça-y-est, j’y suis. Le voyage en train via Marseille a été un peu galère... Physiquement parlant je veux dire. Mon pied me fait mal, mais je sers les dents et j’essaye de sourire crânement alors que je m’avance vers le petit groupe de personne qui sirote un café autour d’un parasol, devant le préfabriqué qui sert de bureau à l’antenne des Glénans à Sète. Ma valise à roulette dans une main et ma canne dans l’autre, j’ai bien conscience que l’on me regarde, et j’imagine les questions qui viennent à l’esprit. Qu’est-ce donc que ce gros bonhomme boiteux qui nous arrive là ? C’est un marin ça ? 

Mais non, j’déconne. Ils n’ont certainement pas pensé ça... Du moins pas en ces termes. Mais j’imagine bien que ma silhouette et ma démarche ont dues leur poser quelques légitimes questions, ne serait-ce qu’en termes de responsabilité. Normal, je me posais les mêmes.
Bonjour ! Bonjour ! Oui c’est moi... Quel stage ? Le 3 voiles pour Barcelone... Ok... Tu veux un café ?

C’est toujours pareil lorsqu’on débarque en milieu inconnu... Une espèce d’attente, de retenue. On se regarde du coin des yeux, on n’ose pas, on attend... Jusqu’à ce que quelqu’un se décide à aller vers l’autre et franchisse le pas... Et pour le coup, c’est bibi qui s’y colle. Mais comme à chaque fois que j’ai le trac, je surjoues le truc. Je m’écoute parler et je me dis que j’en fais trop. C’est bizarre comme impression... J’entends ma voix et dans ma tête je me dis : « Mais tu vas la fermer ta gueule ! ».
Mais impossible d’arrêter la machine lorsqu’elle est lancée. Je parle, je parle... Et je ne vais m’arrêter de parler que dans le train qui me ramènera quinze jours plus tard.

Les arrivées s’étalent tout au long de l’après-midi, et vers 16h00 l’équipage est enfin au complet. Il y a Charline, d’une beauté insolente de jeunesse et de timidité. Jean et Paul, amis de longue date et habitués à naviguer ensemble. Xavier, le jeune cadre parisien sapé comme pour les voiles de Saint Tropez. Julien, un jeune Belge de Waterloo empêtré dans ces 18 ans. Véronique, la prof Valaisanne... Et Régis, le moniteur. La cinquantaine flamboyante, avec cette petite touche de retenue qui est l’apanage des gens sûrs d’eux.
Et ma pomme, bien sûr.

Cela fait en tout huit personnes. Et il va falloir caser tout ce petit monde sur le Bonne Espérance, un Sun Odyssey 35... Ah oui ! Parce que la première chose que l’on apprend c’est que le beau Dufour 405 dont je vous avais montré la photo, et qui est effectivement amarré à un mètre de notre rafiot, et bien il n’est pas pour nous. Il va profiter à une bande de gamins pré-pubères... Pas de bol. Mais bon, je me dis que 35 pieds (10,667479 m) c’est à peu-près la taille de la future Boiteuse, donc je vais pouvoir me mettre le gabarit dans l’œil et commencer à tirer des plans plus justes.

On consacre le reste de l’après-midi à des taches peu glorieuses mais cependant indispensables. L’avitaillement (l’achat de la bouffe pour la durée de la croisière), l’inventaire du bateau... Bref, la routine habituelle aux Glénans avant que de larguer les amarres.
Le soir, premier repas en commun avec une omelette aux oignons. On papote pour faire connaissance. On compare nos expériences de navigation respectives. En fait, nous formons un groupe assez hétéroclite aussi bien en termes d’expérience que de parcours, d’âge... Cela promet d’être un peu compliqué, mais non dénué d’intérêts.
Couché minuit et demi.

Le dimanche 4 juillet 2010
43°16'57.21"N 3°30'44.20"E
Sète-Cap-d’Agde

Levé 05h45. Je me fais un café alors que tout le monde dors. Je sors sur le pont et je regarde le soleil se lever entre les silos de Sète. Je prends quelques photos, c’est magnifique. Je goutte particulièrement ce moment où le port s’éveille tout doucement, et pendant une quinzaine de jours cela sera mon petit moment privilégié à moi tout seul. Un bol de café, une clope, et l’astre qui apparait... Putain, c’est le pied.
En parlant de pied, la veille au soir j’ai braqué ma lampe sur le mien avant de m’endormir... Il était difforme comme jamais il ne l’avait été depuis des mois. Des années même.
Et pendant un moment j’ai eu peur que ces saloperies de crises d’arthrite de reviennent... Le lendemain il avait dégonflé mais je ne vous raconte pas la galère pour arriver à poser un pied devant l’autre au saut du lit.

Le temps de terminer de préparer le bateau, de déjeuner, et nous voilà partis sous les coups de 13h00 en direction de Cap-d’Agde pour une petite mise en jambe. Il s’agit pour Régis de constater les qualités de chacun et d’organiser ainsi la suite des opérations.
Ma première prise de barre se révèle être catastrophique. J’ai perdu mes repères depuis le temps et je me débrouille comme un manche. Putain ! Il est où ce vent ? La barre c’est à droite ou à gauche qui faut la mettre ? Doucement avec tes gestes ! Quelle brute épaisse tu fais mon Gwen !
En regardant faire les autres je me dis que je suis un gros nul, particulièrement lorsque je vois le jeune Julien qui lui, semble né avec une barre franche à la main. Limite agaçant le gamin...

En fin d’après-midi nous arrivons au port de Cap-d’Agde. J’ai mal partout. De vieux muscles trop longtemps restés inactifs se rappellent à mon souvenir et je sens que le soleil ne m’a pas épargné non-plus. Ça brule à l’intérieur et à l’extérieur. Mais bon, ce sont de saines douleurs et à la limite elles me font du bien. Elles sont associées au plaisir de me retrouver sur l’eau et de sentir le vent sur mon visage et ce goût de sel sur mes lèvres. Bref, en dépit de mes piètres prestations du jour, je suis heureux. 

Ma cheville est énorme, mais bizarrement beaucoup moins douloureuse que la veille. Elle ressemble à ce cauchemar que j’ai fais un peu avant de partir (J’ai rêvé que j’avais une patte d’éléphant au bout de la jambe !). On dirait bien que « ça » tient le coup... Pour l’instant.

Le soir on a droit à un spectacle de son et lumière sur les façades de la ville, avec du son très fort. Malgré ça je m’endors comme un bébé, comme à chaque fois que je dors dans un bateau. Le clapot sur la coque et l’oscillation légère sont comme une berceuse pour moi. C’est très utérin comme sensation.

La VHF (la radio) a annoncé un avis de Grand Frais pour le lendemain. Du Nord-ouest à 7-8 Beaufort, ca va bastonner ! Un temps à ne pas mettre un bateau-école dehors, sauf pour les Glénans bien sûr !

Le lundi 5 juillet 2010
43° 6'31.03"N 3° 5'38.35"E
Cap-d’Agde-Gruissan
Vingt-Dieux ça souffle ! On prend trois ris dans la GV et on enroule le génois au deux-tiers (j’expliquerais plus tard pour les terriens) et vogue la galère en direction de Gruissan !
Au bout d’un moment il faut bien se rendre à l’évidence, on n’y arrivera pas. Les chiffres de l’anémomètre ne cessent de grimper : 30, 35, 40 nœuds ! ça fait quand même des rafales à 74 Km/h merde !
La mer est d’un bleu-vert-blanc assez malsain. Heureusement pour nous la houle ne s’était pas encore levée, sinon nous aurions été au plus mal. Cela-dit, pour un deuxième jour de navigation on ne prend pas de risque et on décide de se réfugier à Valras-plage (Oui Monique, Valras, pas Valréas !).
Manque de bol, on n’a pratiquement pas de fond et le sens du vent (ou notre incompétence) nous empêche de nous saisir de la bouée désignée par la capitainerie. Au bout de trois essais infructueux, on laisse tomber et on décide de tenter Gruissan malgré tout. Le vent ayant tourné à l’Ouest puis au Sud-ouest, nous fait face... Pas le choix, on remballe tout et on fait la route au moteur.

Pour ma part, je vais piquer un roupillon dans la cabine arrière (à côté du 30 CV !), et c’est la gueule chiffonnée que j’émerge alors que nous arrivons à Gruissan. C’est moche. Une vraie usine à touriste, sans âme et à l’architecture particulièrement triste.
Le soir, douche et papotage. Demain les conditions météo devraient être plus ou moins les mêmes, en tous cas le matin. Mais nous n’avons pas le choix, Barcelone est encore loin.

Le mardi 65 juillet 2010
42°22'24.16"N 3° 9'43.85"E
Gruissan-Llansa
Bonne journée de nav’, comme on dit. On a bien fait marcher le Bonne Espérance, avec un bon vent de travers et une pointe de vitesse à 10 nœuds ! Pour un bateau comme celui-ci, et avec le poids embarqué, c’est très bien croyez-moi.
Ce n’est pas une course, mais ce n’est pas de tout repos non-plus. Il faut rester concentré et ne pas faire d’erreur. On a commencé les tours de « chef de bord », c'est-à-dire que l’un après l’autre nous faisons comme si nous avions la responsabilité pleine et entière du bateau et de ses passagers. Régis veille au grain bien sûr, mais sait se faire discret. Cet après-midi c’est mon tour et je me sens comme un jeunot inexpérimenté... ce que je suis peut-être, après tout.

Allez ! Je vais être sympa avec moi-même (si-si !) et dire : Bon élève, consciencieux et intéressé, mais doit encore faire ses preuves !

Côté peton, ce fut une journée idéale. La cheville enflée comme pas possible, mais pas de douleur ! ( ?) J’ai l’impression d’avoir le pied dans une bottine de coton... ça fait bizarre.
Ah, au fait ! Il faut peut-être que je précise un truc. Llansa c’est quand-même en Espagne mine de rien ! Nous avons franchi la frontière en milieu d’après-midi et hissé le pavillon de courtoisie jaune et rouge. Llansa est une charmante petite citée balnéaire nichée au creux des Pyrénées. La seule mauvaise surprise est le prix de la place de port pour la nuit... 56 € ! Ils ne se mouchent pas avec le coude les espingos ! En plus, je ne vous raconte pas la place où ils nous ont foutus ! A quinze bornes des sanitaires !
A ce prix-là, c’est douche froide au jet sur le quai et pipi dans le port !
20h45, le soleil est sur le point de disparaitre derrière les montagnes, je prépare l’appareil photo mais une voix m’empêche de profiter pleinement du spectacle.
A table !
Dans la vie il faut savoir choisir ses priorités, et des couchés de soleil il y en a tous les soirs. J’obtempère donc et me précipite dans le carré.

Le 7 juillet 2010
41°50'35.20"N 3°7'37.27"E
Llansa-Palamos

Première journée 100% ibère, avec comme point difficile le passage du fameux Cap de Creus (prononcez créous !) avant que d’aborder la Costa Brava. Point difficile, tu parles ! Pas un pet de vent, et c’est donc au moteur que nous naviguons pendant la majeur partie de la journée. Vers 14h30, le vent daigne enfin se lever mais, là encore, dans le pif ce qui nous oblige à tirer des bords.
Sinon, c’est jolie la Costa Brava. On dirait un peu la côte du côté de saint Raphael, si vous voyez ce que je veux dire. Nous avons fait un petit tour dans la baie de Cadaquès et admiré cette ville que je connais, mais sous un angle, comment dire... différent. A un moment un type a foncé vers nous avec son zodiac pour nous proposé une bouée de mouillage. Nous avons décliné, genre la réponse que l’on fait dans les magasins trop chers : « Non merci, nous ne faisons que regarder ! ».
Les Estartits sont belles, elles aussi. De grandes falaises qui réjouissent le regard après la morne platitude des plaines languedociennes.
Aujourd’hui, je n’ai pratiquement rien fait... J’ai bien tenu la barre une petite heure le matin, mais c’était juste pour participer. J’avais envie de buller, du coup je me suis installé le plus confortablement possible dans le cockpit pour écrire. Et je vous assure que ce n’est pas évident sur ce bateau quand on est huit !
En plus mon clavier me manque... Il va falloir absolument que je m’achète un pc portable, parce que le stylo c’est vraiment pas pratique. Et puis ça fait mal à la main heu !

A bord tout le monde somnole une peu. Le soleil tape et il fait quelque chose comme 40° d’après ce qu’annonce la radio. Certainement beaucoup plus dans le cockpit compte tenu de la réverbération.
Du coup attention au coup de soleil ! D’ailleurs c’est bien simple pour moi c’est badigeonnage deux à trois fois par jour d’écran solaire (indice 20) et immersion dans la Biafine® le soir ! Ça m’a l’air d’être une bonne stratégie, car pour l’instant j’ai bien pris le soleil sans peler, ce qui m’était coutumier lorsque j’étais plus jeune.

Je vous l’ai dis, le Bonne Espérance fait 35 pieds, ce qui me donne un excellent aperçu de ce qui m’attend. J’imagine déjà les transformations que je pourrais faire... Définitivement une barre à roue, et puis surtout pas de ce putain de chariot d’écoute dans le milieu. Supprimer une banquette aussi... Rajouter une ou eux batteries, une éolienne, des cellules photovoltaïques, et j’aurais avec tout ça plus de place qu’il n’en faut pour vivre.

Arrivé à Palamos en fin de journée. Port pas très sympa et d’un coût prohibitif. 68 € la nuit ! A éviter absolument dans l’avenir.

La suite plus tard...